RECHERCHES ARCHEOLOGIQUES DANS LE BOURBONNAIS

Arrondissement de Moulins

par Hugues VERTET, Philippe BET et le B.T.C.G.

 

Revue archéologique SITES, Supplément au N° 9., 42 pages. 1980

Fascicule publié avec le concours du Conseil Général de l'Allier.

 

p. 1

 

INTRODUCTION.

 

 

A l'occasion de l'Année du Patrimoine, il a paru utile de présenter au public quelques apports de l'archéologie du département de l'Allier. Trois expositions organisées par trois associations s'y sont efforcées. L'une présente les recherches à Vichy, l'autre à Néris et dans la région qui entoure ces deux villes. La troisième concerne l'arrondissement de Moulins; elle suggère plus qu'elle ne présente des objets; elle informe sur les recherches et sur leur urgence, plus qu'elle ne donne des résultats. A cela plusieurs raisons; un très riche musée archéologique se trouve à Moulins même. C'est le lieu où se dirigent normalement les pas de ceux qui veulent regarder les fragiles témoins du passé. D'autre part cette exposition que nous organisons veut surtout rendre honneur aux travailleurs bénévoles qui donnent leur temps, leur force, leur attention, à la conservation de la mémoire de nous tous. Plusieurs travaillent pour gagner de quoi payer un mois de sauvetage de votre patrimoine.

Vous verrez qu'ils sont en majorité des jeunes gens. Le désintéressement, la passion du bien commun, la minutie attentive, la ferveur, la compréhension de l'importance du passé sont-ils l'apanage de la jeunesse? Regardez un dur chantier de fouilles et comptez les anciens.

 

photo p. 1.

Fouilles de l'atelier de potiers de Toulon-sur-Allier/Le Lary en 1979.

 

p. 2

 

 

L'ARCHEOLOGIE,

 

 

SON BUTS, SES MOYENS, SES REGLES, SA LEGISLATION.

 

 

Le but de l'archéologie est de connaître la vie quotidienne des hommes dont personne n'a écrit l'histoire. Elle nous permet de connaître la maison, le lieu de travail, la tombe de celui dont personne ne parle. Ainsi pouvons-nous savoir comment évolue la civilisation, comment l'homme a lutté pour échapper aux pièges des éléments, pour maîtriser la nature, pour échapper aussi aux pièges des autres hommes; dans cette recherche constante de libération extérieure et intérieure, l'archéologie nous montre que l'homme est né pour apprendre à être libre et à vivre en société.

Les moyens de l'archéologie? L'archéologue ne recourt à la fouille que bien prudemment. Toute fouille est destruction d'un site. Après que reste-t-il? des tessons, des monnaies, des silex, des murs vite détruits. L'archéologue, pour rechercher de nouveaux sites et mieux déterminer les anciens, utilise la prospection aérienne, la prospection au sol, les mesures électriques et magnétiques. II respecte le message envoyé par les anciens. Il est si facile de le comprendre de travers.

S'il fouille, et si le bulldozer lui en laisse le temps, il va lentement, comme un chirurgien. Il mesure, il photographie, il relève des plans, des coupes: la place d'un objet par rapport à un autre est souvent plus importante que l'objet. Il fait appel à des spécialistes qui font des prélèvement. Ensuite, il faut conserver, laver, numéroter, restaurer, classer, dessiner, photographier, comparer, publier.

 

 

PHOTO p. 2 : Le Professeur Thellier calant un ensemble de prélèvement archéo-magnétique sur un four de potier découvert à Varennes-sur-Allier. A droite, un prélèvement déjà plâtré va être détaché.

 

p. 3

 

LA L0I

 

 

Si l'archéologie est une connaissance de l'homme aussi sérieuse, on remarque qu'elle est bien différente de la passion du collectionneur. Celui-ci est tourné vers le plaisir de posséder, l'archéologue vers la joie d'être plus complètement un homme.

Aussi l'archéologie, mémoire collective, est-elle informée et protégée par une loi précise. Personne n'a le droit de s'arroger la possession de ce qui appartient à tous.

Faire des fouilles est soumis à une autorisation délivrée par la direction régionale des Antiquités. Brimade ? Non. Refus de dilapider le patrimoine.

 

Deux adresses:

Direction des Antiquités Historiques d'Auvergne, Faculté des Lettres, 34 Avenue Carnot, 63000 Clermont-Ferrand.

Direction des Antiquités Préhistoriques d'Auvergne 20 rue Saint-Genès, 63000 Clermont-Ferrand.

 

 

PHOTO p. 3 : Four de potier de la fin du premier siècle de notre ère à Yzeure/Saint-Bonnet. Un grand vase accolé au foyer permettait de chauffer un liquide quand le four était allumé. C'est le seul exemple d'une telle installation connu en France actuellement.

 

p. 4

 

LA PREHISTOIRE.

 

La préhistoire de cette partie du département mériterait à elle seule une exposition, et nous ne présenterons ici que quelques éléments. Elle est très riche, mais encore très mal connue. I1 y a très peu de recherches systématiques faute de moyens et de personnel.

 

PALEOLITHIQUE.

 

Des installations paléolithiques de plein air (50.000 ans avant J.-C. environ) ont été signalées ici et là par MM. Abauzit, Genty, Pic, ...

On sait aussi que bien plus tard vers 30000 avant J.-C., des hommes s'étaient installés à Chatelperron. Les fouilles de M. Delporte, en 1968, ont montré que le climat est allé en se refroidissant pendant un millénaire. Pendant les 1800 ans suivants, faute de recherches, nous n'avons pas trace de nos ancêtres. Vers 12000 ans avant J.-C., les derniers chasseurs de rennes magdaléniens ont laissé une trace vers Thionne, comme l'ont montré P.Y. et R. Genty en 1971; bien d'autres sont encore inconnues.

Jusque vers 8000 avant J.-C., la population d'Auvergne augmente avec la fin de la période paléolithique. P.Abauzit et P.Y. Genty ont trouvé une trace de cette période à Thiel-sur-Acolin.

 

NEOLITHIQUE.

 

Durant la fin du Vème millénaire et le début du IVème, c'est la période appelée néolithique. La pluviosité augmente terriblement. Les habitats de plaine de cette période ont été détruits par d'énormes inondations. Leurs vestiges sont détruits ou masqués par des quantités considérables de dépôts lacustres et d'alluvions. Seules en Auvergne, les découvertes comme celles du val d'Allier, entre Moulins et Vichy, restent possibles. Les berges des fleuves restituent des vases qui laissent supposer l'existence de villages et de nécropoles moins profondes qu'ailleurs. I1 est urgent de les situer, de les protéger contre l'érosion de l'eau et

des travaux des hommes dont les projets menacent le val d'Allier.

 

AGE DU BRONZE.

 

On doit à P. Abauzit et à P.Y. Genty la connaissance du seul gisement à éléments céramiques du Bronze ancien actuellement repéré sur le cours inférieur de l'Allier. A Chemilly, des prospections lors de défonçages ont attiré leur attention. Des fosses leur ont livré de grands vases souvent très fragmentés. A eux aussi, la fouille à Dompierre-sur-Besbre d'une incinération du bronze final. (en 1962) , ainsi que d'autres sites où ils ont fait de précieuses découvertes.

A Diou, au Donjon, à Bègues, à Lubié, cent ans de ramassages montrent que le Bourbonnais a connu une forte implantation de techniques métallurgiques dès la fin du Bronze ancien. Des influences orientales s'exercent par le canal des plaines de la Saône, par l'enfilade des vallées de la Dheune, de la Besbre,...

 

p. 6

 

photo

 

MURAILLE VITRIFIE DE BEGUES.

 

En 1976, un cultivateur de Bègues découvrait sous sa charrue une surface dure et pierreuse. On en voit ici le début du nettoyage. Il s'agit de la muraille de l'oppidum de Bègues. Des blocs de micaschiste et de calcaire s'étaient soudés ensemble par la fusion. Comment les anciens sont-ils arrivés à une température suffisante? Nous ne le savons pas encore de façon certaine.

 

Les orifices qui apparaissent correspondent à des vides à peu près cylindriques, emplacement probable de morceaux de bois qui ont brûlé.

 

La fouille s'est étendu sur le flanc de la colline, où les éboulis du mur sont recouverts de terre végétale. Il semble que seul le soubassement de la construction ait subi le traitement du feu. Sur le plateau, derrière le mur, un sondage réduit a donné quel-ques menus tessons marquant peut-être la place des habitats.

 

p. 7

 

LES CIVILISATIONS DE L'AGE DU FER,

HALLSTATT.

 

 

Vers 700 avant J.-C., des objets de fer apportés par le commerce apparaissent dans notre région. Après des variations climatiques -c'est une des caractéristiques de notre globe d'avoir des climats très variables, et en 1980, nous semblons aller vers une période humide en Europe- la pluviosité s'accroit de nouveau, le fond des vallées est impraticable, Chemilly est abandonné. Des cavaliers, accompagnés de chiens, armés d'épées en fer, originaires du bassin supérieur et moyen du Rhin, apparaissent. Leurs villages, leurs citadelles, leurs cimetières témoignent d'une nouvelle culture; elle a été étudiée dans les autres départements de l'Auvergne, mais pas dans l'Allier, faute de moyens.

Aux alentours de 550 à 450 avant notre ère, les hommes du premier âge du fer sont en mesure de développer leur propre culture locale, et de mettre en oeuvre un fort réseau d'échanges commerciaux. Il se crée probablement une caste armée organisant son pouvoir sous une forme militaire.

Elle s'installe .dans des places fortes, celle de Bègues parait en être un témoin. Dès fragments de vases importés de Grèce au Vème siècle avant J.-C. y ont été découverts par P. Abauzit. Nous y avons effectué un sondage sur l'énorme rempart vitrifié qu'entourait cette citadelle. Un chemin tracé au bulldozer a endommagé une partie de ce site célèbre, et pourtant à peine connu, sans nulle protestation, il y a une décennie environ.

A. Lusigny, une tombe en pleine terre de cette période fouillée par MM. Abauzit et Genty a donné des éléments de parure en fer. Des ateliers de. bracelets en schiste montrent une activité artisanale notable à , Montcombroux.

 

LA TENE.

 

Cette période précédé la fin de, la conquête romaine. Comme les autres, elle est très mal connue dans notre région. Une nécropole, fouillée au débute du siècle, a donné des épées, des épingles, des fibules et bracelets.

L'Auvergne de cette époque constitue le royaume arverne. Elle est riche, ses mines d'or sont célèbres. L'une d'elle à Saint-Goussaud a laissé 20 000 m3 de déblais, celle de la Bessette permet de conclure à l'extraction de vingt tonnes d'or. Les monnaies arvernes en ce métal sont célèbres. L'une d'elle a été découverte près de Saint-Gérand Le Puy. Le tumulus du Fayet Ronaye (Puy de Dôme) a livré une faucille d'or, ...

La défaite, puis la capture du roi des Arvernes en 121 avant J.-C. marque le début d'une phase de déclin de ce peuple dont les frontières allaient jusqu'à la Loire.

S'instaure alors une période de troubles politiques à l'intérieur de son territoire. I1 s'ensuit ,un recul de son influence au bénéfice de celles du peuple des Eduens (Autun) et des romains, qui s'installent en Provence. Les troubles politiques et économiques engendrés par la guerre des Gaules augmentent vraisemblablement une récession importante.

 

p. 8

 

Les grandes lignes de l'histoire pré et protohistoriques de cette partie du département peuvent être esquissées par les découvertes des régions voisines. Mais on voit clairement combien peu de témoignages dus à des recherches sur place les rendent certains.

Département frontière, riche de tant de passages, de tant d'influences, au cours de centaines de milliers d'années, département ignoré, à la mémoire mutilée.

 

Pour plus de détails sur ces périodes, on peut se reporter aux articles de J-P. Daugas, H. Delporte, et F. Mallacher, parus dans les tomes II et III de La préhistoire française, éditions du C.N.R.S., et à ceux de MM. Abauzit et Genty dans diverses revues régionales ou locales (R.A.C.,...).

 

photo p. 8

BEAULON 1971. Urne biconique du Bronze final. Elle était remplie de cendres, de frag-ments d'os brûlés et de traces charbonneuses, et recouverte d'une assiette couvercle décorée. (Gallia, 1972, 2, p.460.j.

 

p. 9

 

PERIODE GALLO-ROMAINE.

 

 

La Gaule conquise par les Romains s'organise en Provinces. Après plusieurs soulèvements contre l'occupant, les Gaulois en sont arrivés après 150 ans d'occupation à se sentir intégrés à l'Empire. La paix romaine a provoqué une expansion économique très importante. Dans notre région se sont installés des ateliers de potiers tout à fait remarquables. La variété de leur production: statuettes en terre blanche, vases lisses ou à décor en relief (sigillée), imitation de vases métalliques, lampes, gobelets à paroi fine, revêtus de surface rouge, blanche, métalissée, de peinture ou de glaçure plombifère, céramique de cuisine, chenets, éléments d'architecture,..., en font un des centres production les plus originaux de l'Empire romain pendant les deux premiers siècles de notre ère.

Avec une ingéniosité étonnante, les Gaulois imitent aussi bien les produits de l'Italie que ceux du Proche-Orient. Ce qui sort de leurs ateliers se vend non seulement dans. toute la Gaule, mais en Suisse, en Allemagne, en Hongrie, e~ Belgique, en Hollande,... Ils fondent des succursales jusque sur les bords du Danube...

Grâce à leur étude, nous connaissons l'évolution des techniques, des arts, de la religion populaire. Mais il n'est pas sûr que cette industrie florissante pendant les deux premiers siècles de notre ère n'ait apporté que des bienfaits.

Les ateliers, les cabanes, les tombes des artisans sont misérables; l'art local traditionnel a disparu. I1 serait très utile d'avoir 1es moyens de comprendre ce qui s'est passé exactement.

Une carte des ateliers connus actuellement montre pourquoi cette région de la Gaule attire tout particulièrement l'attention des archéologues du monde entier.

 

photo p. 9

 

p. 10

 

Carte de sites archéologiques de l'Allier

(les noms suivis d'un numéro sont des ateliers de potiers)

Cette carte est extraite des "Recherches sur les ateliers de potiers gallo-romains de la Gaule centrale", Publications SITES, 1980.

 

p. 11

 

L'ATELIER DE TOULON-sur-ALLIER / LE LARY .

 

 

La commune de Toulon-sur-Allier est connue depuis près d'un siècle et demi, sur le plan national et international, pour ses deux ateliers de potiers du Lary et de La Forêt. Des fouilles anciennes ont fourni quantité de statuettes et de céramiques qui ont enrichi les musées de Moulins et de Saint-Germain-en-Laye. Il semble que surtout au Lary nos prédécesseurs aient recueilli tous les moules et toutes les figurines en explorant tous les lieux où il pouvait s'en trouver.

 

Au Lary, grâce à l'obligeance des propriétaires de deux parcelles contiguës appartenant aux familles Allais et Poulet, nous avons pu reprendre en 1960-61-62, en 1971-72, en 1977-78-79, une série de campagnes de fouilles.

Nous avons retrouvé les bases des fours que nos prédécesseurs avaient détruits; de là, nous en avons relevé les mesures, les plans. Les anciennes publications n'en donnaient que des vues perspectives très inexactes accompagnées d'indications erronées. Des prélèvements d'argile, des mesures archéomagnétiques ont été effectuées. Des installations, comme un fossé en S unique en son genre, des sols d'atelier, des murs sont étudiés chaque année.

Les potiers de Toulon ont laissé de larges fossés remplis de déchets de cuisson. L'étude des dizaines de milliers de tessons de ces ensembles clos permettra de connaître les proportions de chaque forme de vase, leur signature, ...

Les conclusions obtenues sont déjà importantes: La partie des officines fouillée a fonctionné dans la IIème partie du second siècle, dans la période 160/180 après J.-C. environ. On y fabriquait non seulement des figurines moulées, mais de la céramique lisse et moulée à vernis rouge (sigillée) ou métallescente, des vases à reliefs d'applique, des vases à parois fines ornés de barbotines ou de guillochures, des assiettes et des jattes décorées de peinture rouge...

L'atelier de La Forêt paraît avoir eu une activité analogue.

 

p. 12

 

planche :

Décors de vases sigillés moulés du second siècle (Toulon).

 

p. 13

 

FOUILLES D'UN HABITAT A PROXIMITE

 

DES ATELIERS DE POTIERS DE TOULON/ALLIER,

 

au lieudit "La Forêt"

 

Les fouilles de M. de la Jolivette, puis celles d'Alfred Bertrand, avaient révélé, au siècle dernier, au lieudit "La Forêt", à environ deux kilomètres au sud du bourg de Toulon, l'existence d'un atelier de potiers-mouleurs. Mais, comme maintes fouilles de cette époque, aucun plan ne situait la localisation précise du gisement archéologique. Aussi, plus d'un siècle après, nous ne savions où situer ce site dans ces prés qui rendent la détection si difficile.

En novembre 1978, nous avions effectué une prospection sur le tracé de la voie express, après le premier décapage, qui justement passait au pied du château de La Forêt, et en bordure de la Sonnante, petit affluent de l'Allier. C'est au profil 35, que nous avions découvert un grand nombre de fragments de statuettes et de poteries. L'examen des coupes des drains permit d'observer des couches archéologiques encore en place. Devant l'importance du site que tant de découvertes laissaient suppose M. jean Busnel, Préfet de l'Allier, fit interrompre les travaux pour permettre une fouille de sauvetage. D'un commun accord avec M. Mollard, Directeur Départemental de l'Equipement, un délai fut convenu, que nous voulûmes et pûmes respecter grâce à l'aide bénévole d'une quarantaine de fouilleurs durant un mois, malgré le froid et la pluie.

 

LE BATIMENT.

 

Outre des zones d'occupation que nous avons fouillées sur plusieurs centaines de m2 et qui ont livré un abondant mobilier céramique, la fouille de La Forêt a permis de dégager un bâtiment rustique qui doit se trouver à proximité immédiate des ateliers.

Le bâtiment a une longueur supérieure à vingt mètres et a un plan trapézoïdal (largeur du mur à l'ouest : 7m50, à l'est : 6m50. I1 est construit à l'aide de gros moellons informes d'environ 25 cm de côté, qui ne sont pas jointifs. La largeur du mur est d'une trentaine de centimètres. Aucune trace de mortier n'a été remarquée. Le niveau d'occupation se trouvait en surélévation par rapport aux murs. I1 est installé sur un remblai bien daté par une pièce de la seconde moitié du II ° s .

 

UN DALLAGE EN TERRE CUITE.

 

Quelques éléments d'un dallage réalisé avec des tegulae, posées en diagonale et à joints croisés, ont été retrouvés en bordure du mur sud. Dans ce secteur, nous avons relevé la trace en négatif d'une poutre sablière.

 

p. 14

 

Toulon/Allier "La Forêt" - 03.

Plan au 1/50e du bâtiment F 1 (1979)

 

p. 15

 

LE FOYER D'UNE CHEMINEE.

 

A l'intérieur du bâtiment, dans les secteurs J-K/5-6, nous avons découvert le foyer d'une cheminée. Formant un arc de cercle, il a une longueur d'environ 1m40, une profondeur intérieure maximum de quarante centimètres environ. Ce foyer installé en oblique par rapport au mur sud devait faire ainsi une sorte de recoin, marquant ainsi peut-être l'existence d'une cloison. I1 est construit avec des tegulae, brisées ou non. La sole du foyer était recouverte d'une épaisse couche de charbon de bois.

 

UNE TOITURE EFFONDREE AVEC DES TUILES ENCORE ENTIERES.

 

La couche de la toiture effondrée recouvrait l'ensemble des vestiges, et avait une épaisseur variant de 15 à 30 cm. Plus d'une vingtaine de tuiles, entières ou reconstituables, ont été dégagées. Certaines avaient encore leur clou de fixation sur la charpente en place. L'examen de cette couche a permis de déterminer une pente de toit vers le sud.

 

CONCLUSION.

 

Cette fouille nous a donc permis de voir un habitat extrêmement simple en liaison sans doute avec les ateliers tout proches. Le mobilier abondant permettra de mieux connaître les productions des potiers de Toulon/La Forêt de la seconde moitié du deuxième siècle.

 

photo p. 15

Le foyer de la cheminée.

 

p. 16

 

THIEL-sur-ACOLIN.

 

 

En creusant les fondations d'une maison, non loin de la gare de Thiel, une quantité de figurines en terre blanche fut découverte.

Un atelier existait probablement dans ce bourg qui fut probablement un croisement de routes à l'époque romaine. L'argile des statuettes est plus rose que celle des autres ateliers de la vallée de l'Allier.

Les types de figurines sont assez semblables à ceux des autres fabriques du second siècle. On notera cependant un remarquable petit personnage (notre illustration) habillé à la gauloise. Un pantalon collant, braie, recouvre le bas de son corps. Le haut est revêtu d'une courte tunique à manche large dont le bas est orné de franges. Un capuchon relevé laisse apparaître des cheveux bouclés et encadre son visage sérieux et paisible qui porte des moustaches tombantes et une courte barbe. Les épaules bien protégées, il présente de ses deux mains une assiette penchée en avant, offrande à quelque dieu.

 

photo p. 16

 

p. 17

 

YZEURE / SAINT-BONNET.

 

L'atelier de potiers de Saint-Bonnet était connu depuis au moins un siècle, et la surveillance de ce site nous a permis de sauver et d'étudier de nombreux vestiges.

En 1960-61, lors des travaux d'un lotissement, M. Secrétain, propriétaire, nous a laissé effectuer des fouilles et des relevés sur des fours de potiers de la fin du premier siècle découverts dans les tranchées. On y fabriquait une belle céramique fine, de couleur ardoisée claire.

C'est ici que se firent les premiers prélèvements archéomagnétiques du Professeur Thellier, expérimentation d'une méthode qui allait permettre d'étudier les variations du pôle magnétique terrestre. En raison de ces découvertes, la rue qui traverse ce lotissement fut appelée "rue des Romains".

En 1967-68, des travaux d'installation d'eau et d'égouts dans la rue Claude Debussy permirent d'étudier des couches profondes. Des vestiges de début du premier siècle, bols à surface noire et luisante, imitation de gobelets italiques, furent dé-couverts. D'autres vestiges, moules, statuettes,-, démontrèrent que l'on produisait ici des petits flacons en forme de statuettes recouverts de glaçure plombifère.

En 1974-75-76-77, grâce à l'obligeance de M. Vallet, propriétaire d'un terrain à l'angle de la rue Claude Debussy et de la rue de Bourgogne, des fouilles continues purent être organisées.

Un cimetière attenant à l'ancienne paroisse Saint-Bonnet fut en partie fouillé. Une des tombes les plus anciennes contenait une monnaie frappée à l'époque du fils de Saint Louis. Le cimetière eut une durée très longue. Les tombes anciennes , très pauvres, présentaient des fosses peu profonde creusées à la hâte, trop petites, où les défunts sans cercueil touchaient de leurs genoux fléchis et de leur dos, les parois de leur dernière demeure.

 

Photo p. 17

Sépulture double du cimetière médiéval de Saint-Bonnet/Yzeure.

 

 

p. 18

 

Ces tombes avaient découpé en tous sens des installations gallo-romaines; les plus anciennes comportaient des fossés d'écoulement remplis de tessons et de terre noire. Par-dessus des sols de cailloutis damés, rechargés à plusieurs périodes, semblent avoir appartenu à des ateliers.

Au-dessus, une installation de forge ou de fonte du fer avait été presque complètement détruite par les inhumations. L'argile rougie et les scories sont nombreuses à Yzeure, et les anciens fouilleurs avaient noté qu'elles servaient à établir le sol de maisons antiques. Plus tard, probablement au début du second siècle de notre ère, un atelier de fabricant de figurines moulées s'est établi sur les lieux.

Des quantités de fragments sortis des mêmes moules, cassés à la cuisson, ont permis de reconstituer des figures encore inconnues dans le monde gallo-romain. La patience des fouilleurs, puis d'Yves Connier, l'habileté de Madame Xavier du Vigan, a permis de restituer ces bustes étranges de dames au cou orné d'un lourd torques à tête de serpent, ces cavaliers gaulois tenant leur bouclier polygonal, ces Minerves, ces Vénus. Les animaux familiers de la maison bourbonnaise du début du second siècle nous sont parvenus aussi: le cheval harnaché ou non, le chien assis avec sa clochette, les paons avec leurs plumes en forme de roues, les coqs,...

 

Mais que d'éléments du passé perdus au cours des fondations d'une maison, des tranchées d'urbanisation,... Comme nous le disaient des archéologues anglais et allemands venus en étude: "pourquoi envoyons-nous des missions en Grèce ou en Italie.? c'est dans les sites bourbonnais que sont les secrets de notre civilisation européenne. Dans ce creuset de l'Allier s'est produit la rencontre du monde méditerranéen et du monde celtique. Et, la plupart du temps, personne n'est là pour se baisser et regarder. Nous avons des équipes de fouilles, mais la France a les sites les plus importants, et elle les détruit."

 

p. 20

 

A VARENNES-sur-ALLIER,

 

 

RECOUVERTE D'UN ATELIER DE LA FIN DU PREMIER SIECLE.

 

 

La construction d'une maison à Varennes-sur-Allier, sur le versant du plateau qui domine la plaine, en 1975-76-77 permit des découvertes fort importantes grâce à la compréhension du propriétaire.

Plusieurs fosses remplies de déblais furent fouillées. On y trouva notamment des copies de vases en bronze recouverts de glaçure plombifère, jaune ou verte, ou de couverte micacée. La fabrication de ces vases, dont la date était encore inconnue, put être placée à la fin du premier siècle de notre ère.

Des fours de potiers furent mis au jour, attestant une fabrication locale de vases domestiques de belle facture.

Des murs et des sols bétonnés de maisons gallo-romaines apparurent. Ils avaient coupé des installations plus anciennes, antérieures à la conquête, qui fournirent aussi de nombreux tessons de cette période.

 

Photo ci-dessous: four de potier découvert à Varennes.

 

p. 21

 

AU-DESSUS D'UN HABITAT DU PREMIER SIECLE,

 

L'ATELIER DE POTIER DU SECOND SIECLE DE BEGUES.

 

En creusant un puits perdu dans le jardin potager de la maison de repos des chauffeurs routiers, dans le village de Bègues, une grande quantité d'ossements apparut. Une campagne de fouilles révéla une installation gallo-romaine complexe qui ne put être exploré entièrement faute de crédits.

 

photo

vase noir orné de guillochures découvert à Bègues.

 

Un four de potier du second siècle avait été installé au-dessus d'une profonde citerne ( ? ) . Le remplissage de celle-ci s'était tassé et la moitié du four s'était alors disloquée. Ce four avait dû succéder à une installation de potiers plus ancienne, sur un morceau de moule de gobelet du début du premier siècle fut trouvé à proximité.

Une maison comportant un sous-sol où l'on accédait par un escalier de quatre marches, une profonde citerne(?) creusée dans le roc fissuré, avait existé là. Tout l'ensemble avait été ruiné et rempli de gravats et de vases brisés dans la deuxiè-me partie du premier siècle. Plusieurs de ces vases d'un beau lustre noir ornés de guillochures purent être remontés et restaurés. De nombreux tessons de sigillée de La Graufesenque ( Millau ) , d'amphores hispaniques, attestent qu'un commerce actif reliait Bègues, à la fin du premier siècle, au Sud de la Gaule et de l'Espagne.

I1 y aurait beaucoup à découvrir sur ce site, où en 1966-67-68 nous avons pu explorer un petit coin d'un grand ensemble antique.

 

p. 22

 

BEGUES.

 

Au fond, un four de potier du seconde siècle. Il ne subsiste que la moitié de la paroi construite en morceaux de briques. A mi-hauteur une corniche où s'appuyait la sole. Les murs transversaux appartenaient à un bâtiment gallo-romain plus ancien. On aperçoit sous le four l'orifice d'une citerne ou d'une cave creusée dans le rocher.

photo p. 22

 

p. 23

 

COULANGES, lieudit MORTILLON.

 

 

L'existence d'une officine de potiers gallo-romains avait été signalé au siècle dernier par le Docteur Bailleau de Pierrefitte-sur-Loire.

Nous avons d'abord retrouvé un four de potier dans la cour d'une ferme. Grâce à l'obligeance de M. Henri de Villette, nous l'avons fouillé en 1962 et il l'a protégé par une dalle de béton.

Attentif à la richesse du site, M. de Villette nous a signalé la découverte de nouveaux fours dans ses prairies. Des campagnes de fouilles eurent lieu en 1963-64. Une mission envoyée par M. Thellier, Directeur de l'Institut de Physique du Globe, permit la découverte de nombreux fours avec un magnétomètre à proton. I1 s'agissait pour ce savant de vérifier une hypothèse de recherche fondée sur le magnétisme de l'argile cuite. Les résultats fort concluants donnèrent lieu à un doctorat, et cette métho-de est actuellement utilisé dans le monde entier.

Un ensemble de fours de plusieurs époques fut découvert:

-fours tibériens (20 après environ). L'atelier fabriquait des vases moulés, de la céramique fine et grossière. Le premier moule copié sur les moules d'Italie trouvé en Gaule fut découvert à Mortillon.

-un four de la fin du premier siècle qui fabriquait des cruches et des vases culinaires.

-de nombreux fours à jattes travaillaient à la fin du second siècle. Les producteurs du Centre de la Gaule semblent avoir à cette époque spécialisé les ateliers. Le nom des potiers est souvent estampillé en creux dans l'argile fraîche sur le rebord des vases.

-trois cabanes de potiers, petites, pauvres, ont été découvertes. L'une du début du premier siècle, les deux autres de la fin du second.

 

Ce site exceptionnel avait un port d'embarquement des vases au bord de la Loire. Il a été détruit par l'érosion du fleuve. Une partie de ses installations a été anéantie par la construction du canal parallèle à la Loire. Une déviation de la route et la reconstruction du pont ont encore détruit une partie du site. I1 eut été facile d'éviter ce désastre supplémentaire par une dépense qui eut été minime par rapport à la valeur particulièrement grande du site.

 

Actuellement, ce qui en reste est protégé par un classement comme monument historique.

 

p. 24

 

photos p. 24

 

Partie inférieure d'un four de potier du II°s découvert à Mortillon. Un pilier central et des piliers latéraux soutenaient la sole où les poteries étaient mises à cuire dans une chambre construite au-dessus du sol. Le mur de façade et la fosse du four sont en haut de la photo.

 

 

Fondation de la cabane d'un potier. En l'absence de pierres, l'artisan a utilisé des morceaux de tuiles et des jattes brisées pour faire la base de ses murs (qui étaient probablement en torchis. Les jattes étaient lé production essentielle des potiers de Coulanges à la fin du second siècle.

 

p. 25

 

L'ATELIER DE ST REMY EN ROLLAT.

 

 

L'atelier de St Rémy-en-Rollat fut découvert vers la fin du siècle dernier par M.Givois, propriétaire alors des lieux. En 1900, l'archéologue moulinois Bertrand entreprend des fouilles sur le site; il y découvre des statuettes en argile, des oscilla, et de la céramique plombifère. En 1942, M. Latournerie y fouille une couche cendreuse et met au jour un grand nombre de fragments de vases et de moules. C'est en 1960-62 que nous pûmes réentreprendre des recherches à St-Rémy-en-Rollat grâce à l'extrême obligeance de M. Dru. La fouille d'une poche de terre cendreuse permit la découverte de nombreux fragments de céramiques plombifères, de tasses dites "à parois fines", d'assiettes à pâte grise ou ardoisée, de cruches blanches,... Des travaux routiers causa la découverte en 1962 de fragments de poteries de l'atelier.

Il semble y avoir eu à St-Rémy des produits de deux périodes:

-Claude-Néron : céramique à glaçure plombifère (avec de nombreux fragments de moules), à engobe blanc, assiettes en terre-grise, vases décorés d'écailles,..., biberons, passoires.

-Fin Ier/début IIème siècle: statuettes en argile et oscilla.

 

figure

Vase découvert à Saint-Rémy en Rollat en 1960.

 

p. 26

 

SEPULTURES DECOUVERTES A CHAVROCHES.

 

 

A la suite de leur découverte, en 1965, du mobilier d'une incinération gallo-romaine, dans les alluvions de la Besbre, sur le domaine des Chenaux, commune de Chavroches, P.Y. Genty et P. Abauzit surveillaient régulièrement ce secteur.

Quelques mois après cette première découverte, ils purent fouiller, en sauvetage, une tombe en place, mais déjà très endommagée par une crue de la rivière.

5 années plus tard, ils dégagèrent une troisième tombe qui était devenue visible par le recul du talus lors d'une crue.

Ils furent aidés dans ces interventions par MM. Valette, exploitants du domaine des Chenaux.

 

Les deux dernières tombes étaient également des incinérations qui se présentaient sous la forme de fosse contenant une couche charbonneuse d'un noir intense en forme de croissant.

Les restes osseux étaient accompagnés d'un important mobilier céramique; les offrandes de la tombe 2 comprennent 18 vases dont 12 sigillés ou métallescents, et au minimum trois lampes; plusieurs de ces vases ont subi l'action du feu; Les offrandes de la tombe 3 s'élèvent à 14 vases, dont 7 sont des sigillées ou productions similaires; Dix ont subi l'action du feu, et deux poteries portent un point de choc autour duquel les cassures partent en étoile.

D'après l'étude de cette céramique, P . Y . Genty et P . Abauzit ont pu dater la tombe 2 environ des années 160-180 ap. J.-C. La tombe 3 est peut-être plus récente.

Ces fouilles ont apporté d'intéressants éléments à l'étude des rites funéraires gallo-romains dans notre région.

 

Coupe p. 26

 

p. 27

planche

Une partie du mobilier de la tombe 3 de Chavroches.

 

p. 28

 

A CRESSANGES,

 

SAUVETAGE D'UN HABITAT RURAL.

 

 

Le site que nous avons fouillé en sauvetage se trouve au sud-est du bourg de Cressanges, au lieudit "Les Ouches". I1 est situé sur le parcours de la voie express "Est-Ouest" de l'Allier, au profil 195. A cet endroit le terrain présente une forte déclivité vers l'est.

 

LES RAISONS DE L'INTERVENTION.

 

Lors des travaux de terrassement de la voie express, les engins mécaniques ont détruit sur une grande surface un site gallo-romain. Une prospection au sol vers la fin du mois de mars nous le fit constater. Une structure, composé de deux empilements de pierres, et d'une couche de tuiles à rebord brisées, était visible dans la coupe sud de la voie rapide. Nous chargeâmes alors MM. Brun et Labonne, tous deux membres du groupe archéologique de Tronget et instituteurs à Cressanges, de surveiller l'avancement des travaux. Le jeudi 5 mai 1977, M. Labonne, aidé de M. Brun et de leurs épouses, dégagea une amphore, dont le fond manquait, qui avait été heurtée par un engin. Le jour suivant nous apprîmes que la coupe sud de la voie rapide allait être modifiée, mettant ainsi en péril la structure que nous avions repérée.

Une fouille de sauvetage fut donc décidée. Un compromis fut établi avec la direction du chantier routier. I1 fut décidé que la fouille devra être achevée pour le 13 mai, gênant ainsi au minimum la progression des travaux routiers et nous permettant d'effectuer le sauvetage. Ce délai a été scrupuleusement respecté.

 

L'ETAT DES DECOUVERTES.

 

Nous avons effectué un grand décapage (44m2) de l'ensemble. I1 révéla un bâtiment déjà fortement endommagé par les travaux routiers. Celui-ci est composé d'un mur orienté nord-ouest/sud-est, long de 8m50, et de deux autres murs sensiblement perpendiculaires, et dont la longueur est inférieure à trois mètres. La largeur des murs, dont les pierres sont uniquement liées à la terre, est d'environ deux pieds (60-64 cm).

 

UNE TOITURE EFFONDREE EN PLACE.

 

Nous avons accordé une attention particulière à la couche de la toiture effondrée. Par l'examen attentif de la position des tuiles, nous avons pu déterminer qu'elle était orientée vers le sud-est, et qu'il s'agissait d'un toit monopente, par conséquent, le mur de 8m50 était un pignon.

 

p. 29

 

Photo I: Le site de Cressanges après le premier décapage. Les murs et la surface de la couche de la toiture effondrée viennent d'être mis au jour.

 

Photo 2: La toiture effondrée a été fouillée. La fouille du niveau d'occupation vient d'être achevée, laissant les murs du bâtiments bien visibles.

 

Photo 3: A l'heure et au jour convenus, la fouille s'achève. I1 était temps, les terribles scrapers commencent déjà à rugir.

 

p. 30

 

Nous avons retrouvé dans la première rangée de tuiles, une tegula, avec son clou plat placé près de l'encoche, qui devait soutenir toute la rangée. Le trou pratiqué dans cette tuile avait été pratiqué après cuisson. D'autre part, les tuiles devaient être posées à sec. Sur ce même toit, nous avons remarqué. deux types de tegula différents: le premier a une longueur de 43,3 cm et une largeur 34 cm, un rebord haut de 5, 1cm, épais et large de 2,4cm; il a une pâte fine rouge-orangée et des marques en forme de demi-cercle (jusqu'à 3 anneaux concentriques). Le second type, beaucoup plus irrégulier, a une longueur de 42,3 cm, une largeur de 33,2 cm, un rebord d'une hauteur variant de 3,8 à 4,6 cm, d'une largeur de 3 cm environ, et d'une épaisseur de 2,4 à 2,9 cm; il a une pâte plus grossière que le précédent. Une tuile de ce type présente une marque triangulaire. Ces tegulae différentes ont été retrouvées ensemble dans la toiture effondrée, ce qui renforce le caractère rustique de l'ensemble.

 

UN MOBILIER TRES PAUVRE.

 

Le mobilier domestique est peu abondant, et principalement concentré dans la partie sud-est du bâtiment. Il s'agit essentiellement de vaisselle commune (marmite, pot, ...). Quelques tessons de sigillée lisse attestent une occupation au second siècle de notre ère, mais il n'a pas été possible de mieux préciser la datation.

 

UNE DEPENDANCE AGRICOLE (?)

 

A la suite de ces constations, nous pouvons penser qu'il s'agit d'une dépendance qui devait être accolée à un bâtiment plus important, malheureusement détruit par les travaux.

I1 est à noter que la partie haute de la toiture reposait sur le mur qui recevait la pluie, qui vient du nord ou de l'ouest; le grand pan de mur situé dans la partie nord-ouest du bâtiment devait être, par conséquent, souvent humidifié. Puisque les constructeurs ont préféré donner au toit une pente dans le sens contraire de la logique, nous pouvons peut-être supposer que le bâtiment s'ouvrait sur une cour sud-est. Cette orientation en elle-même est d'ailleurs judicieuse. Nous la retrouvons dans nombre de fermes traditionnelles et gallo-romaines. Elle procure un excellent ensoleillement le matin, une protection efficace contre le vent, et un assainissement du bâtiment.

Cette fouille a donc permis de révéler un aspect particulier de l'habitat rural gallo-romain dans l'Allier, mais cela n'a été possible que grâce à l'intérêt que nous avons porté à la toiture effondrée du bâtiment.

 

Cette fouille n'a pu être menée que grâce à la participation bénévole de Jacqueline et André Blaize, Maurice et Nicole Blanchet, André Brun et son épouse, Rémy Ouranthon, Michel et Michelle Labonne, et d'un grand nombre d'habitants de Cressanges. Que tous soient ici remerciés.

(Groupe Archéologique de Tronget ALT)

 

M. Labonne (ALT) a pu par quelques sondages dans le secteur touché par la voie express délimiter les zones d'occupation de cette exploitation agricole gallo-romaine. I1 a par ailleurs trouvé en avril 79 un fragment, de statuette de Vénus du IIe s.

 

p. 31

 

FOUILLES DANS LA FORET DE DREUILLE.

 

 

 

La forêt de Dreuille, près de Cosne d'Allier, recèle de nombreux sites archéologiques. L'un d'eux, dans la section 9, par des anomalies topographiques de terrain assez importantes, avait particulièrement attiré l'attention de M. Delmont (0. N. F) , qui en fit part à M. Léchevin, Historien de Buxières-les-Mines, qui voulut y voir des installations liées à l'exploitation du minerai de fer.

Ce site attira malheureusement aussi des curieux qui, à cause de son isolement, purent effectuer, en toute tranquillité une fouille clandestine. Celle-ci entraîna la destruction partielle d'un mur en petit appareil, .de facture gallo-romaine, et ce sur plus d'un mètre de hauteur.

D'autre part, M. Lechevin demanda à la Direction Régionale des Antiquités, qu'une fouille soit pratiquée à cet endroit pour confirmer ou infirmer son hypothèse.

Pour ces deux ces deux raisons et avec l'accord de l'0. N. F. , une rapide campagne de fouilles de quinze jours fut menée durant le mois de février, avec une petite équipe de fouilles et ce sous la neige et sans abri!

 

Cinq sondages furent implantés: le carré 1 afin de vérifier le bien-fondé de l'hypothèse de M. Léchevin; le carré 2 et le caisson 3 à cause de la fouille clandestine mentionnée plus haut; les caissons 4 et 5 afin de mieux saisir le contexte des structures mises au jour.

 

UN PIERRIER CONSTITUE LORS DE LA RECUPERATION DES MURS.

 

Le carré 1, de six mètres de côté, enserre en totalité un monticule de pierres (moellons de construction en petit appareil, pierres de blocage). M. Léçhevin pensait qu'il pouvait y avoir là une batterie de six fours pour la fusion du minerai de fer. Mais le nettoyage intégral de cette structure et son examen amenèrent des conclusions très différentes: il ne s'agit que d'un pierrier, d'un tas de pierres, taillées ou non, qui proviennent de la récupération des murs à une époque que nous n'avons pu déterminer, mais qui se situe après l'ensevelissement du site, car des tranchées de récupération sont visibles à plusieurs endroits.

 

UN MUR HAUT DE 1m50.

 

Le carré 2 est situé au sud-est du carré 1, et implanté dans le prolongement de la fouille clandestine mentionnée plus haut. A moins dix centimètres par rapport au sol, la fouille a permis de mettre au jour un mur d'orientation est-ouest approximativement et de facture soignée. I1 est construit en petit appareil, avec des moellons d'environ 9,5 x 15 cm de côté et aux bords arrondis. Les joints ont une épaisseur de 2cm et sont faits à base de chaux blanche. La pierre utilisée est le grès.

 

p. 32

Plan des structures - Dreuille 1978

 

p. 33

 

Les couches rencontrées dans la partie nord du sondage sont les suivantes: sous le niveau d'effondrement du mur, dénommé "cl", se trouve une couche de tuiles tassées ("c2") qui correspond à la toiture effondrée. Les tuiles sont, sauf à de rares exceptions, totalement émiettées par le poids des moellons qui se trouvaient par-dessus. Nous avons cependant retrouvé un fragment de tuile à rebords avec du mortier à la chaux, ainsi qu'une extrémité d'une imbrex avec du mortier à la chaux des deux côtés. Au milieu de ces fragments de tuiles, nous avons mis au jour une grande quantité de joints de toiture en pisé. Sous cette couche, un sol à base de chaux blanche, légèrement rosi par les tuiles écrasées, fut dégagé. Aucun tesson de poterie domestique n'a été retrouvé sur ce sol. Le mur a ici une élévation maximale de 67 cm, et présente des traces d'incendie.

Dans la partie sud du carré, les couches "cl" et "c2" ont été également rencontrées. Sous "c2", se situe une couche de terre de couleur verdâtre, d'une épaisseur de 3 centimètres environ ("c3"). En dessous de celle-ci, se trouve un niveau sablonneux avec poussière de brique et fragments de tuiles à plat ("c4" ) en surface. Le sol antique devait correspondre à ces niveaux "c3" /"c4", à environ moins 65 cm par rapport au niveau du sol actuel. A cette profondeur, le mur présente un ressaut (qui évite la remontée de l'humidité) qui correspond au départ de la fondation. Celle-ci est faite de grands blocs de pierre liés au mortier de chaux. A -100 cm par rapport su sol actuel, il y a un second ressaut. Au niveau de celui-ci , des coulées de mortier sont visibles. Elles proviennent d'un léger débordement, lors du coulage du mortier et des pierres, hors de la tranchée de fondation. La couche "c5" se situe entre ces deux ressauts et correspond à un remblai. Sous celle-ci, la couche "c6" est constituée par un niveau sableux non remanié mais d'une compacticité insuffisante pour asseoir un mur. La fondation du mur s'arrête en bas de ce niveau, à -163 cm par rapport au niveau du sol actuel, où elle repose sur le "bon sol", un niveau de sable extrêmement compact et induré, qui constitue notre couche "c7".

Le mur a ainsi, fondation comprise, une élévation de 154 centimètres environ. Un petit fragment d'un plat en sigillée de forme 18/31, de la seconde moitié du deuxième siècle, a été trouvé dans la tranchée de fondation de ce mur, datant ainsi cette construction. '

 

TROIS AUTRES MURS.

 

La fouille clandestine avait mis au jour un mur d'orientation nord-sud perpendiculaire au mur orienté est-ouest fouillé dans le carré 2, un sondage fut ouvert dans le prolongement du mur (caisson 3).

Immédiatement sous la couche d'humus, nous avons rencontré la couche de démolition du mur (cl). Parmi les moellons, nous avons retrouvé un fragment d'une base de colonne, mais qui a très bien pu avoir été utilisé dans le blocage du mur. Le dégagement de la couche "cl" a permis de découvrir deux nouveaux murs: un mur nord-sud qui se trouve en grande partie dans la berme ouest. I1 est construit dans un petit appareil moins soigné que celui du mur du carré 2. L'autre mur est perpendiculaire et au nord du précédent. Sa construction est encore plus grossière. Sous la couche "cl", se trouvait la couche de la toiture effondrée ("c2"), et sous cette dernière se situe le niveau "c3" qui correspond au sol de la pièce, constitué par une couche de terre argilo-sableuse de couleur grise-verte.

 

p. 34

 

Enfin dans la partie sud du caisson, et perpendiculairement au mur N/S, nous avons dégagé, sous la couche "c2", un Troisième mur, fortement arasé, puisqu'il n'en reste plus qu'un rang. Ce mur, construit aussi en petit appareil, a donc été arasé avant l'effondrement de la toiture et des murs. Mis à part la découverte d'un très petit fragment de verre vert, aucun autre mobilier archéologique n'a été découvert sur le sol "c3".

 

LES AUTRES SONDAGES.

 

Le caisson 4 a été ouvert dans le prolongement du carré 2 et a permis de situer le retour du mur E/W dégagé dans ce carré. Le caisson 5 a été ouvert en vue de savoir s'il existe une ouverture du bâtiment vers l'extérieur. Seul le premier décapage a pu être effectué.

 

EN CONCLUSION

 

Cette fouille a permis de déterminer l'aile d'un bâtiment compartimenté, longue d'une quinzaine de mètres et large d'environ 5, 5m, orientée est-ouest, et donnant sur une cour (au sud des murs dégagés). Les vestiges sont bien conservés et nous pouvons noter l'absence totale de mobilier archéologique (mis à part deux fragments). La faible superficie de la fouille n'a pas permis de déterminer la destination exacte du bâtiment qui devait s'étendre sur une surface de 500m2. S'agit-il d'une exploitation agricole, d'un bâtiment lié à un artisanat, ... ? Le saurons-nous un jour. Ce site va, en effet, être menacé prochainement par des travaux forestiers.

 

Nous tenons à rendre hommage ici à tous nos fouilleurs bénévoles qui n'ont pas hésité à travailler dans des conditions très difficiles, dans le froid, sous la neige ou sous la pluie: Marie-Anne Delval, Jacques Hubert, Yves Connier, Martine Houtekier, M. et Mme Blaize, M.et Mme Blanchet, Jean Pierre, Rémy Duranthon, Pierre Debriette, Mme Sarrazin,..., et plus particulièrement Odile Cartault, victime d'un accident de travail particulièrement grave qui lui causa un traumatisme crânien. Nous tenons aussi à remercier vivement M. le Maire de Buxières, et M.Delmont de l'Office National des Forêts pour leur aide précieuse, et M. Colin de nous avoir si gentiment prêté un toit.

 

p. 35

 

Photo 1: La partie sud du sondage 2 qui a révélé un mur haut de 1m54 (fondation comprise). On remarque au niveau du second ressaut les coulées de portier.

 

Photo 2: Vue du sondage 3 qui a permit la mise au jour de trois murs en petit appareil (ici vus de l'extérieur du bâtiment).

 

Photo 3: L'ouverture du carré 2, sous la neige et dans le froid.

 

Photo 4: Le site de Dorière. vue du premier décapage.

 

p. 36

 

LA FOUILLE DE DORIERE, A BUXIERES-les-MINES.

 

 

Au lieudit "Dorière", sur la parcelle 466 du cadastre de la commune de Buxières, le creusement de deux puits avait occasionné la perturbation d'un site gallo-romain. En mai 1977, la compagnie des eaux fit creuser une longue tranchée à cet endroit, afin d'y installer une conduite d'eau, et qui coupa le site sur plusieurs dizaines de mètres. Vu l'importance des éléments antiques remontés à la surface, une fouille s'avéra indispensable. Avec l'aimable autorisation du propriétaire et de la Direction régionale, nous ouvrîmes un caisson de 8x8m à l'ouest de la tranchée de canalisation. Un premier décapage permit de mettre en évidence une couche d'épandage de pierres et d'éléments antiques en terre cuite (poterie domestique, tuiles,...). Tous ces éléments étaient sans ordre, et il était difficile de déterminer la nature du gisement. Un plan photographique fut effectué, ainsi qu'un relevé des niveaux. Le second décapage n'apporta pas d'éléments nouveaux. Le troisième mit à jour le substrat. Il semblerait que cette structure ne soit en fait qu'un dépotoir, déjà arasé par les travaux agricoles, ayant par endroit une élévation de près de 50 cm. A une époque indéterminée (mais qui peut-être antique, car nous n'avons trouvé aucun élément de poterie d'une autre période que gallo-romaine), on a dû rassembler ici la démolition de bâtiments qui peuvent être proches du sondage, vu qu'une prospection au résistivimètre révéla à plusieurs endroits de la parcelle de fortes anomalies. Un autre sondage fut établi au nord du premier caisson, à un endroit où la résistivité était plus élevée qu'ailleurs. I1 permit la découverte d'un mur de faible élévation et de construction grossière. Aucune démolition n'environnait ce mur, et un grand fragment de poterie antique était plaquée contre. Il s'agit peut-être d'un mur de clôture.

La fouille aurait sans doute mérité à être étendue, mais comme ce site n'était plus menacé dans un avenir immédiat, il parut plus souhaitable de suspendre cette fouille, devant la menace de destruction qui pèse sur tant d'autres sites de cette région de l'Allier.

 

La fouille a été effectuée avec le groupe archéologique de l'ALT/Tronget Nous remercions M. Brun, propriétaire du terrain, de son accueil.

 

p. 37

 

UNE NECROPOLE MEROVINGIENNE A ST HILAIRE.

 

En août 1979, à quelques mètres de l'église paroissiale, le Docteur Lacroix fit abattre d'anciennes écuries afin de faire bâtir à son emplacement un nouveau bâtiment du Centre de Réadaptation qu'il dirige. Lors du creusement des fondations, des sarcophages furent mis au jour. Avertis, des membres du groupe archéologique de Tronget, avec Maurice Blanchet, viennent sur les lieux et font des relevés. M.Lacroix, très intéressé par l'Histoire, fait suspendre les travaux de construction durant une semaine dans le secteur concerné pour permettre une fouille de sauvetage. Une vingtaine de sarcophages entiers ou brisés, des sépultures en pleine terre, sont dégagés. Trois niveaux superposés de sarcophages ont été relevés: dans le premier et le plus récent, les sarcophages ont une orientation nord-sud, mais ils ont été fortement endommagés lors de l'établissement des écuries du château; ceux des deux autres niveaux sont orientés nord-est/sud-ouest et est-ouest. Des murs en petit appareil, peut-être romains , et dont il ne reste que peu de choses, sont également dégagés. Aucun fragment de céramique n'a été retrouvé avec ces vestiges, et rend, par conséquent, difficile une datation précise.

La fouille a pu être effectuée sans problême durant une semaine, grâce à l'aide constante de M. Lacroix et des moyens qu'il a mis à notre disposition.

Les sarcophages ont pu être conservés et seront visi-bles dans le Centre de Réadaptation.

 

Photo p. 37

 

p. 38

 

UN PUITS MEDIEVAL DECOUVERT A TRONGET.

 

 

En 1980, sur la pente sud de la colline sur laquelle est construite le bourg au lieudit "Le Verger", des tranchées ont été creusées pour l'aménagement d'un terrain de sport. M. Maurice Blanchet, responsable du groupe archéologique de Tronget (ALT), suivit ces travaux. Il vit apparaître un cercle de pierres noircies. Muni de l'autorisation de la Direction régionale des Antiquités Historiques, il entreprit une fouille avec son groupe.

Un puits médiéval de 2m60 de profondeur fut vidé. Il était effondré et rempli des pierres qui l'entouraient. La paroi n'était conservée que sur 30 à 40 centimètres de hauteur.

Au fonds du puits, des vases brisés, une vingtaine, ont été minutieusement recueillis et recollés. C'est une céramique admirablement tournée, aux parois minces, souvent décorées de pastilles et de bandes striées en relief, revêtue par place de glaçure plombifère.

Le Maire de Tronget, M.Robert Deterne, attentif à l'histoire de sa commune, a autorisé le groupe archéologique à prospecter sur tous les terrains communaux.

 

Photo p. 38

 

p. 39

 

DES SARCOPHAGES A BOURBON L'ARCHAMBAULT.

 

Des tranchées pour l'installation des égouts ont amené la découverte, puis la fouille, d'une nécropole située tout contre la Mairie de Bourbon l'Archambault. Des sarcophages empilés témoignent de la proximité d'une église dont le souvenir même n'a pas été conservé.

Une fois le premier sarcophage sorti de la fouille, la place de la ville fut largement ouverte pendant quinze jours. Cela permit de relever la disposition des tombeaux, entre lesquels des inhumations en pleine terre avaient été disposées.

Grâce à l'aide de l'Ingénieur Divisionnaire, et de la Mairie de Bourbon l'Archambault, plusieurs sarcophages furent extraits et sont conservés visibles aux habitants et aux visiteurs de la cité balnéaire.

 

photos p. 40

NOUVEAUX CHANTIERS PREVUS EN 1980.

A Varennes-sur-Allier, une voie romaine a été coupé par des travaux. On aperçoit l'empierrement de la voie antique.

 

A Chazeuil, des travaux de drainage sur les terrains de la ferme expérimentale de la C.N.E.M.A. ont mis au jour des dalles. De nombreux tessons gallo-romains ont été recueillis.

 

 

p. 41

 

CELEBRATION DE L'AMNESIE.

 

 

Cet aperçu de quelques sauvetages, de quelques fouilles, confirme malgré sa brièveté, que l'arrondissement de Moulins possédé une richesse archéologique remarquable, non seulement inexploitée, mais encore en voie de destruction. I1 en est de même dans tout le département.

Une réunion organisée en 1979 à la M.J.C. de Vichy avait rassemblé les amateurs qui essaient de sauver les miettes du patrimoine et les chefs des grands services départementaux. I1 serait indispensable qu'une telle concertation se reproduise régulièrement.

Les entreprises privées de travaux publics, de construction, de remembrements, comme les services de l'Equipement, des Mines, de l'E.D.F., de l'Agriculture, des Eaux et forêts,..., ont la mission d'aménager de nouvelles structures d'habitat, de communication, de transmission, d'exploitation des richesses naturelles et agricoles,... Par là même, ils ont à bouleverser le sol, à creuser des tranchées; à défoncer, à ouvrir des carrières, etc. Ce faisant, ils détruisent. un fragile patrimoine archéologique. Dans l'homme, une grande partie de la mémoire se trouve dans le cerveau; pour les nations, elle se trouve sous nos pieds. Dans les deux cas, on n'y touche pas impunément, sans la troubler gravement.

Une prise de conscience des moyens à employer pour harmoniser recherches archéologiques et travaux, pour élaborer des programmes, pour mettre en oeuvre des moyens, pour respecter des délais,..., n'a pas encore été faite dans l'Allier.

Se faire complice des destructions, si discrètes soient-elles, enfreindre les lois de protection du patrimoine, volontairement ou non, parce qu'elles gênent, c'est une attitude de plus en plus fréquente. Est-ce préparer un monde meilleur? Chacun de nous est menacé par la destruction accélérée de la mémoire et par la construction d'une société amnésique.

"A quoi ça sert? regardez donc l'avenir!"

Si je garde le souvenir de mon enfance, de mon adolescence, de mon âge mûr, cela m'empêche-t-il d'agir ou cela m'aide-t-il? Pour chercher le sens de ma vie, cela m'aidera-t-il ou me gênera-t-il? Un enfant abandonné et sans mémoire de ses parents est-il plus libre qu'un autre? Nous savons bien que la plupart d'entre eux n'arrivent à se réaliser qu'au prix d'efforts bien supérieurs à ceux des autres.

Un des profonds malaises de notre société est la peur de l'avenir. J'ai peur de l'avenir chaque fois que je ne regarde pas clairement le passé, chaque fois que je perds de vue les luttes pour la liberté et la justice, contre l'esclavage de la nature et des hommes,... Les luttes sont le quotidien de nos ancêtres.

L'archéologie nous révèle ce quotidien.

Elle nous rappelle aussi que le mot "irréversible" n'existe pas en histoire. Tout acquis peut être remis en cause par la guerre, économique ou armée, par la violence des nations, la sottise des hommes. L'archéologie nous en fournit des preuves innombrables.

 

p. 42

 

I1 n'y a que la destruction des vestiges, de la nature, de la vie qui soit irréversible. Mais avons-nous envie de le savoir? Il semble que oui.

 

L'effort fait par le Conseil Général de l'Allier est un regard tourné vers cette sauvegarde, et il est juste de l'en féliciter et de l'encourager à développer cette indispensable action.

 

 

_I_N_F_O_R_M_A_T_I_O_N_S__L_E_G_A_L_E_S_: Ce fascicule est un supplément au numéro 9 de la REVUE ARCHEOLOGIQUE SITES, édité avec la collaboration du B.T.C.G.,(66 bd Saint Exupéry, 03400 Yzeure) et le concours du Conseil Général de l'Allier.

Dépot Légal: juin 1980. N° d'inscription à la Commission Paritaire des Publications et Agences de Presse: 60620. N° D.P.P.:444. Dépôt de titre: n°599 à Bobigny. ISSN:01816586. Imprimé et édité par SITES, 65 rue des Clochettes, 93150 BLANC MESNIL (revue trimestrielle, 1 an / 4 n° = 45 francs). Le rédacteur en chef: Hugues Vertet, le directeur de la publication: Philippe Bet. © Tous droits réservés.

 

 

 

retour aux publications sur Lezoux
et la Gaule centrale